Une bouteille de whisky par soir… Surtout quand on est le producteur d’Amy Winehouse, ça fait beaucoup. Pendant des années, Mark Ronson a fait n’importe quoi. Et puis, un jour il a décidé d’en parler avec Simon Le Bon (Duran Duran). Retour sur une rédemption avec l’auteur de «Record Collection».
Mark Ronson, vous avez déclaré avoir arrêté l’alcool… C’est vrai que vous buviez une bouteille de whisky à chaque concert ?
En tournée, on a souvent tendance à boire beaucoup. Surtout à l’époque de Version où l’on enchaînait les festivals. Pour reprendre l’expression américaine : « That was our first time in the rodeo ». On découvrait la vie, quoi. Mais le truc, c’est que je n’ai jamais voulu ressembler à Slash ou à paraître cool en vidant des bouteilles. A bien y réfléchir, boire sur scène était comme un puits sans fond. Un truc très étrange pour me donner confiance. Ce que je regrette, c’est qu’il y a plein de moments dont je peine à me rappeler. Sur certaines dates, mes seuls souvenirs sont mes entrées sur scène. Maintenant, j’arrive à mieux contrôler tout ce stress. Et le fait d’en avoir parlé avec Simon Le Bon m’a énormément aidé. Lui, n’a jamais bu une goutte avant un concert, en trente ans de carrière. J’essaie de m’en inspirer, maintenant que je chante sobre.
Aujourd’hui, vous êtes un amateur de whisky modéré ?
Oui, mais je n’ai pas pour autant arrêté de boire tous les soirs. Je ne me suis pas sevré comme les alcooliques anonymes, et j’apprécie à petite dose le Jack Daniel’s. Simplement, j‘ai beau être admiratif des voix de Janis Joplin ou Amy Winehouse, des chanteuses qui ont clairement abusé à ce niveau-là… L’alcool n’est plus ma façon de voir, du moins en tant qu’artiste.
C’est parce que vous avez produit les deux pop stars actuelles les plus portées sur la bouteille ?
Je n’aime pas trop parler de ça. Déjà parce que cela fait un bail que je n’ai pas vu Lily Allen, ni Amy Winehouse. Même si nous sommes toujours amis. Je peux vous parler du travail avec elles en studio. Mais rien sur leur vie personnelle.
Qu’y a-t-il de noble pour vous, dans le fait de sacrifier sa santé pour tirer quelque chose de sa voix, comme Janis Joplin ?
Yeppps… Je vous ai dit que je ne voulais pas parler de ça.
Votre beau-père est un musicien célèbre (Mick Jones de Foreigner – ndlr). Enfant, vous avez croisé Bowie et Warhol à la maison… C’est difficile de rester clean quand on fréquente le showbizz aussi tôt ?
Bien sûr que j’ai découvert tout jeune la folie des soirées, des excès. A commencer par ceux de mes parents. Ça m’est déjà arrivé de croiser Springsteen dans la cuisine au milieu de la nuit ou de découvrir mon père au petit matin en train de jouer aux échecs avec Daryl Hall (du duo Hall & Oats). Mais ma mère était très stricte, à l’anglaise. Je me souviens qu’on devait toujours rentrer environ trois heures avant la moyenne des kids américains. Donc, je n’ai jamais ressenti ce point de rupture où j’aurais pu perdre le contrôle, tomber dans la drogue ou ce genre de conneries.
Pourquoi avoir appelé votre groupe Mark Ronson & The Business Intl. ? Vous vous prenez pour une multinationale ?
Non, pas vraiment. Sur mon album Version, je jouais de tous les instruments et j’avais tout produit. Disons que c’était un peu ma récréation. Alors, quand j’ai commencé à travailler sur ce nouvel album (Record Collection), j’ai proposé à mes cinq musiciens préférés de me rejoindre en studio. Vu que nous avions tout composé ensemble, cela aurait été un mensonge de créditer ça Mark Ronson. Et puis je réalise que mon seul talent reste la production, je ne me sens pas vraiment « artiste ». Ça ne m’est pas naturel d’être sous les projecteurs. Mark Ronson & the Business Intl., c’est une façon rendre honneur à chacun des intervenants.
«Record Collection», Mark Ronson & the Business Intl. (Sony).
Entretien : Thomas Ducres • Photo : Seb&Enzo.